Pneumonies « atypiques »

Cette confusion générale s'accompagne d'un scepticisme sur la transparence des bilans médicaux. Une source proche des services de sécurité évoque des chiffres trois fois plus élevés que le bilan officiel. De nombreux médecins s'interrogent sur la soudaine hausse des infections respiratoires dans les registres officiels - sans que ne soit mentionné le coronavirus. L'un d'eux, sous le sceau de l'anonymat, confie avoir enregistré une surprenante vague de pneumonies. Dans sa polyclinique, elles seraient en hausse de 40 % par rapport à l'an passé. «Des pneumonies atypiques…», balaie un pédiatre. «Les maladies respiratoires sont à la hausse. La vague ne fait que s'accroître», prévient une spécialiste des maladies infectieuses.

Tests quasi inexistants

Au-delà des messages alarmants ou ironiques sur les réseaux sociaux, il n'existe aucune preuve tangible qui contredise les chiffres étonnement bas des autorités. Très tôt, elles avaient pris des mesures draconiennes envers la Chine, fermant la frontière commune de plus de 4.200 km pour empêcher l'arrivée massive de la maladie. La société russe est, par ailleurs, beaucoup moins mobile qu'en Europe et, au-delà de Moscou et des grandes villes, n'a pas encore la même habitude de sortir dans les cafés et restaurants. Des habitudes de vie limitant donc une rapide expansion du virus.

Autre explication de la faiblesse des chiffres officiels: pendant longtemps, les tests ont été quasi inexistants. Différents des systèmes étrangers, ils ont pu donner des résultats contradictoires. La récente forte hausse du nombre de cas, passé en dix jours de 59 à plus de 1.500, s'explique peut-être par les nouvelles méthodes de dépistage instaurées à Moscou. Les échantillons prélevés auprès des patients étaient jusqu'alors adressés à un laboratoire sibérien pour un deuxième examen mais les autorités de Moscou ont mis fin à ce processus. Dans la Russie de Vladimir Poutine, le mystère sur la sévérité du virus reste donc entier.

Benjamin Quénelle